Résumé
«En vérité, l'insurrection contre mes parents, contre la pauvreté, contre ma classe sociale, son racisme, sa violence, ses habitudes, n'a été que seconde. Car avant de m'insurger contre le monde de mon enfance, c'est le monde de mon enfance qui s'est insurgé contre moi. Je n'ai pas eu d'autre choix que de prendre la fuite. Ce livre est une tentative pour comprendre.»
« Le seul répit était la salle de classe. J'appréciais l'école. Pas le collège, la vie du collège : il y avait les deux garçons. Mais j'aimais les enseignants. Ils ne parlaient pas de gonzesses ou de sales pédés. Ils nous expliquaient qu'il fallait accepter la différence, les discours de l'école républicaine, que nous étions égaux. Il ne fallait pas juger un individu en raison de sa couleur de peau, de sa religion ou de son orientation sexuelle (cette formule, orientation sexuelle, faisait toujours rire le groupe de garçons au fond de la classe, on les appelait la bande du fond). » p.79 « Je le rêvais mort pour qu’il ne puisse plus m’échapper, jamais, que son corps m’appartienne pour toujours » p.143 « Une fois, cependant que j'embrassais Laura dans le préau, une chaleur douce est apparue dans mon bas-ventre. J'ai senti mon sexe se durcir, et plus nous prolongions le baiser, Laura et moi, plus mon sexe se dressait. J'éprouvais du désir : un désir qui se manifestait physiquement, celui-là impossible à mimer, à jouer. Je bandais, comme avec les copains dans le hangar, comme les hommes dans les films pornographiques que regardait mon père dans sa chambre, mon père qui se retirait en précisant Je vais dans ma chambre me mater un film de cul, venez pas m'emmerder. Je n'avais jamais bandé pour une fille. J'y voyais l'aboutissement de mon projet : mon corps avait plié devant ma volonté. On ne cesse de jouer des rôles mais il y a bien une vérité des masques. La vérité du mien était cette volonté d'exister autrement. J'étais enfin guéri. Sur le chemin du retour, le retour du collège pour me rendre chez moi, j'ai ressassé ce constat victorieux comme un refrain que j'aurais écouté en boucle, chaque fois plus puissant, non pas apaisant puisque au contraire je sentais mon corps toujours plus exalté, sinon déchaîné. En retrouvant mes parents j'ai espéré qu'ils pourraient percevoir ma transformation (guéri, guéri). Je me disais que peut-être le corps se transformait soudainement, peut-être mon corps était soudainement devenu celui d'un dur, comme celui de mes frères. J'étais persuadé qu'ils verraient la différence. Ils n'ont rien vu. Souvenirs de cette fin d'après-midi : mon cour tambourinant contre ma poitrine dans le bus (guéri, guéri), le rythme de ma respiration, moins, d'ail-leurs, ce qu'on pourrait appeler le rythme de la respiration qu'un enchaînement de suffocations, les minuscules graviers qui restaient bloqués sous la porte de la maison, produisant un bruit aigu quand je l'ouvrais. Dans mon élan j'ai salué mon père Ça va papa ? Ta gueule je regarde ma télé. » p.161-162 Avoir une bonne éducation par rapport aux « racailles » mais tout de même un vocabulaire peu elaboré dans une maison rongé par l’humidité… Se forcer à être avec des filles : Laura puis Sabrina. Se faire lyncher avant ça, par deux p’tits harceleurs. Plaire aux profs mais ne pas être hyper doué (au départ : la fuite c’est quand même le lycée) Portrait d’un père alcoolique, travaillant à l’usine puis sans travail (car bloqué du dos) Portrait d’une mère soumise, qui lave le cul des vieux, et devant assurer toute la charge domestique. Portrait d’une sœur qui se rêvait médecin, et qui finira vendeuse à la boulangerie du coin. Portrait d’une grand frère violent… Bref, une vie qu’on n’imagine pas vivre…
Recommandé par Ciboulette
"Le choc de la violence de classe. 100 ans plus tard, c'est toujours Germinal. C'est un roman qui claque ! "
Le choc de la violence de classe. 100 ans plus tard, c'est toujours Germinal. C'est un roman qui claque !
Une peinture crue du milieu de l auteur, de son enfance dans la pauvreté et son rapport à l homophobie et le harcèlement qu il a subit. Bouleversant
Quelle dure lecture! Pas sur le style qui est très bien mais sur le sujet du harcèlement et de l’homophobie. On est chez les « red neck » picard, ça pue l’alcool et la consanguinité. Certains passages sont difficiles à lire. Et la fatalité. Et la résignation. Et la méchanceté. Trop dur…