
2021
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Drame
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1h40
Résumé
Dans la mystique région française de Camargue, Tom Medina se retrouve, en probation, sur le pas de la porte d'Ulysse au grand coeur. Tom rêve de devenir une bonne personne.
Vu avec Sylvie sur Canal le 24/6/22
Tom Medina 2020 France Réalisé par Tony Gatlif avec Slimane Dazi, David Murgia, Karoline Rose Drame Dans la Camargue sauvage, un jeune en rupture est placé sous l’autorité d’un gardian. Une pépite du prince Gatlif, sous les feux du rock et du flamenco. Dans les arènes d’Arles, des aficionados bien élevés apprécient en esthètes les passes des toreros en habit de lumière. Soudain, un jeune homme à la chevelure et au regard de jais bondit du public pour aller défier le taureau. Une première fois. Puis une seconde, plus près encore des cornes, avant de se réfugier in extremis dans les gradins d’un saut gracieux. À l’image de Tom, son héros trompe-la-mort dans cette saisissante scène d’ouverture, le nouveau film de Tony Gatlif — et peut-être son plus beau, plus de quarante ans après ses débuts — est d’une audace folle. Comme s’il était habité, possédé par les esprits de la Camargue, où il a été tourné dans l’urgence, dans les jours qui ont précédé et ceux qui ont suivi le premier confinement au printemps 2020. Le réalisateur des Princes s’est souvenu d’un épisode singulier de sa jeunesse tumultueuse quand, pour échapper à la maison de correction, il avait accepté un « séjour de rupture » dans un mas près de Vaccarès. Là, entre les étangs et la mer, il avait appris, à la dure, les soins équins, sous l’autorité bienveillante d’un gardian. Tom Medina est son double de fiction : un « mal-né » prêt à dévorer le monde, séducteur un peu marlou et écorché vif, bloc de colère et de tendresse mêlées. David Murgia, comédien prodige venu du cirque, aussi acrobate que poète, lui apporte son énergie insensée, un bagou à conjurer toutes les détresses, et un sourire à désarmer toutes les résistances. Face à lui, Slimane Dazi bouleverse en père de substitution miné par le chagrin, un éducateur aux antipodes des rôles de caïd auxquels le cinéma français le cantonne trop souvent. Gatlif a trouvé dans les étangs et les plages du delta du Rhône des décors à la démesure de ses personnages. Une nature sauvage, envoûtante, nourricière et hostile à la fois, qu’il filme comme un territoire de magie, où les hommes ne font que passer, où les animaux — moustiques inclus ! — règnent en majesté. Les cavalcades effrénées des chevaux sont mises en scène comme dans un western, et le taureau blanc que traque Tom prend les traits d’une créature fantastique. Pas de grand film de Tony Gatlif sans musique. Celle de Tom Medina est plus métisse, plus fiévreuse, plus libre que jamais. À la mélancolie du flamenco cher au cinéaste répondent les guitares abrasives de Karoline Rose Sun, la pionnière du « brutal pop », qui fait ici des débuts fracassants devant la caméra. La rockeuse et désormais actrice porte la rage du cinéaste contre les ravages du présent — la pollution menace le paradis camarguais, comme le traitement inhumain des migrants met en péril l’harmonie du monde. Mais c’est l’espoir qui l’emporte dans les pas de Tom, ce vagabond magnifique qui, jusque dans la scène finale en hommage aux Temps modernes, apparaît comme l’héritier survolté de Charlot.
La Camargue comme on l’a rarement vue. Des quêtes d’identité, des relations profondes et pudiques qui se nouent sous la musique de manero. Merci Tony Gatlif et bravo à David Murgia