
1993
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Drame
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3h23
Résumé
Ema, pour s’évader de sa vie terre a terre, se réfugie dans la poésie et le romantisme. Ses amours successives ne voilent pas sa désillusion progressive et, comme Emma Bovary, la conduisent a la mort.
Drame • de Manoel de Oliveira • 3h07 • 1993 • avec Leonor Silveira, Cécile Sanz, Luís Miguel Cintra, Filipe Cochofel. Ema a grandi entre son père qui l'aimait et trois servantes qui l'adulaient. Sa beauté a éclos, rayonnante. Le docteur Carlos de Païva, foudroyé par tant de splendeur, demande et obtient sa main. Ema s'installe au Val Abraham, dans la demeure d'un mari qu'elle n'aime pas, pas plus qu'elle n'apprécie ses deux ennuyeuses belles-soeurs. Où est donc l'incomparable bonheur de l'enfance, quand l'amour et le contentement coulaient comme la lumière ? Ema n'a de cesse de les retrouver. Elle fréquente les meilleurs salons de la région, prend des amants, part en vacances, mais ne trouve jamais que l'ennui... ▪️▪️▪️▪️▪️▪️▪️▪️▪️▪️▪️▪️▪️▪️▪️▪️▪️▪️ Il s’agit sans doute, avec Francisca, du plus beau film de Manoel de Oliveira, maître du cinéma portugais. Val Abraham est l’adaptation d’un roman de l’écrivaine lusitanienne Agustina Bessa-Luís, qui revisitait de manière libre et malicieuse Madame Bovary, dans le cadre du Portugal des années 1960. Habitant la région ondoyante du Douro, ornée de vignes, Ema (Leonor Silveira) est ici une bourgeoise à la beauté insolente, malgré sa claudication. Mariée à un médecin transparent, elle se délecte de choses tristes, prend des amants, suscite la convoitise et les éloges de tous avec un flegme langoureux. « Je suis un état d’âme qui balance », murmure-t-elle. Les plans sont des écrins hiératiques, des scènes d’intérieur où les personnages échangent sur toutes sortes de sujets, non sans un pouvoir plein de suffisance du côté des hommes, décrits avec une ironie très mordante. À la fois en retrait et au-dessus d’eux, Ema conjugue innocence et vice, liberté et captivité, en se mirant dans les miroirs. Elle non plus n’échappe pas totalement au regard ironique. Malgré tout, c’est bien sa calme et secrète résistance de femme que le film célèbre de manière très sensuelle, à travers son visage, les paysages et la flore. L’enracinement biblique se double de métaphores sexuelles. Un jeu subtil est par ailleurs instauré entre les dialogues et la voix off, qui se complètent non sans se taquiner. La langue est chuintante à souhait, la Sonate « Au clair de lune » de Beethoven offre un bercement lancinant. Oliveira a 85 ans lorsqu’il signe ce chef-d’œuvre. La dernière séquence, travelling sublime sous les orangers, est une des avancées les plus lumineuses qui soient vers la mort. TÉLÉRAMA • Par Jacques Morice • Publié le 13 février 2025.
Vacances de rêve au Portugal 🌏☀️ bien qu'un peu longues ⌚️