Résumé
George Sand (1804-1876) "Ma chère Thérèse, puisque vous me permettez de ne pas vous appeler Mlle, apprenez une nouvelle importante dans le monde des arts, comme dit notre ami Bernard. Tiens ! ça rime ; mais ce qui n’a ni rime ni raison, c’est ce que je vais vous raconter. Figurez-vous qu’hier, après vous avoir ennuyée de ma visite, je trouvai, en rentrant chez moi, un milord anglais... Après ça, ce n’est peut-être pas un milord ; mais, pour sûr, c’est un Anglais, lequel me dit en son patois : – Vous êtes peintre ? – Yes, milord. – Vous faites la figure ? – Yes, milord. – Et les mains ? – Yes, milord ; les pieds aussi. – Bon ! – Très bons ! – Oh ! je suis sûr ! – Eh bien ! voulez-vous faire le portrait de moi ? – De vous ? – Pourquoi pas ? Le pourquoi pas fut dit avec tant de bonhomie, que je cessai de le prendre pour un imbécile, d’autant plus que le fils d’Albion est un homme magnifique. C’est la tête d’Antinoüs sur les épaules de... sur les épaules d’un Anglais ; c’est un type grec de la meilleure époque sur le buste un peu singulièrement habillé et cravaté d’un spécimen de la « fashion » britannique." Thérèse (Elle) et Laurent (Lui) sont deux artistes peintres qui s'aiment passionnément mais leurs différences tourmentent cet amour...
Je pense que cela faisait réellement beaucoup de temps que je n’avais pas lu un livre aussi bien écrit. Madame Sand, tout mon respect. Et puis, d’un aussi grand réalisme, d’une aussi grande précision dans les attitudes humaines. On sait qu’elle s’est beaucoup inspirée de son histoire avec Alfred de Musset, mais j’ai envie de dire : ce n’est que pour le meilleur ! Cela nous permet d’avoir une histoire très ancrée et juste, juste. En alternant quelques échanges épistolaires, on lit un récit d’une histoire d’amour que l’on peut qualifier, sans euphémisme, de très tumultueuse. Le Monsieur est très certainement fou et toxique et elle reste calme et maternel. On ne comprend pas très bien ce qui les lie mais la narratrice non plus et je trouve que c’est le charme de cette narration : pourquoi trouver de la rationalité dans l’Amour ? Cela serait absolument stupide. Lui tombe amoureux en premier, lui annonce, il la fait succomber alors qu’elle s’était promis de rester sage jusqu’à la mort de son mari (histoire compliquée). Mais il se lasse et la renvoie. Elle va alors se réconforter dans les bras d’un ami de la famille, déjà fou amoureux d’elle, mais il n’arrivera pas à gérer ses pulsions de jalousie et la liaison ne se fera finalement jamais. Le Monsieur essaiera à maintes reprises, dans ses moments de calme et dans ses moments de délire, de revenir, de la reconquérir mais le point final sera donné par l’arrivée de l’enfant de la Dame, dont elle avait été privée il y a fort longtemps. L’amour maternel triomphe dit-elle. Ah, juste magnifique ! La preuve existante d’un combat contre la folie, où l’Amour peut aussi rapidement se transformer en folie aussi. Qui sont les fous ? Les amoureux ?