
2021
•
Étienne Kern
Résumé
4 février 1912. Le jour se lève à peine. Entourés d’une petite foule de badauds, deux reporters commencent à filmer. Là-haut, au premier étage de la tour Eiffel, un homme pose le pied sur la rambarde. Il veut essayer son invention, un parachute. On l’a prévenu : il n’a aucune chance. Acte d’amour ? Geste fou, désespéré ? Il a un rêve et nul ne pourra l’arrêter. Sa mort est l’une des premières qu’ait saisies une caméra. Hanté par les images de cette chute, Étienne Kern mêle à l’histoire vraie de Franz Reichelt, tailleur pour dames venu de Bohême, le souvenir de ses propres disparus. Du Paris joyeux de la Belle Époque à celui d’aujourd’hui, entre foi dans le progrès et tentation du désastre, ce premier roman au charme puissant questionne la part d’espoir que chacun porte en soi, et l’empreinte laissée par ceux qui se sont envolés.
Étienne Kern donne vie à Franz Reichelt, un tailleur qui se tua en 1912 en sautant du premier étage de la Tour Eiffel. Il avait mis au point un parachute qui, il l'espérait, allait lui rapporter un peu d'argent, sauver les vies des aviateurs qui mouraient en nombre dans les premiers temps de l'aviation et aussi, peut-être, séduire Emma, la veuve de son ami Antonio, mort lui aussi écrasé par son avion. L'auteur imagine, à partir des photos, des articles et même d'une vidéo, ce qu'a été la vie de cet homme de 33 ans. En même temps, il examine comment l'histoire de Franz Reichelt résonne avec la sienne. Il est d'origine autrichienne comme son grand-père, qui tomba d'un balcon et mourut à 52 ans, peu avant sa naissance. L'auteur se rappelle aussi une amie, M., passionnée de livres et de Stendhal,qui "mit fin à ses jours" en sautant de son balcon, alors qu'elle se savait atteinte d'un mal incurable. Un livre mélancolique, poétique, érudit. Une biographie magnifique !* Un passage : "Du sol au sommet, trois cent douze mètres. À la base un carré de cent vingt-cinq mètres de côté, délimité par quatre piliers dont les fondations se perdent sept mètres sous terre, dans quatre fosses où des soubassements de béton reposent sur un lit de gravier. 1665 marches, 7300 tonnes de métal, 18000 pièces de fer qui toutes, poutrelles, arcs, croisillons ajourés ont été pensées, dessinées, décrites soigneusement par des dizaines d'ingénieurs, dans des milliers de croquis et de plans. C'est alors l'édifice le plus haut jamais construit par les hommes. C'est la Tour. C'est Babel. C'est la bergère d'Apollinaire, la girafe en dentelle de Cocteau, la cheminée d'usine de Maupassant, l'inutile et monstrueuse construction pourfendue par Zola. Elle est tiède encore d'avoir été fondue, martelée, caressée par tous ceux qui deux ans durant, à raison de douze heures par jour pendant l'été, neuf heures pendant l'hiver ont, rivet après rivet, assemblé, fixé, poli, rendu possible la formidable éruption de métal qui jaillit vers le ciel.