
2024
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Alice Raybaud
Résumé
On aime à se dire qu'elle est essentielle. Mais, en réalité, l'amitié est souvent raillée, considérée comme futile ou invisibilisée. Dans les films, les livres, les imaginaires et les récits que l'on fait de nos parcours, elle passe presque toujours à l'arrière-plan : la jeunesse terminée, elle devrait s'éclipser au profit du couple et de la famille. Elle est ce lien que l'on sacrifie volontiers les années passant, quitte à abandonner une petite part de soi avec. Mais pourquoi le couple romantique représenterait-il l'unique façon de cheminer avec d'autres dans l'existence ? Depuis quelques années, de plus en plus de personnes décident de revendiquer leurs amitiés et de s'engager pleinement dans ces relations. Elles y découvrent des lieux de joie, mais aussi de solidarité et de résistance face aux aliénations du système patriarcal, capitaliste et dans une période de grande incertitude écologique. Hétéros ou queers, entre femmes, entre hommes ou dans des groupes mixtes, elles et ils sont nombreux à réinventer, entre ami.es, des manières de militer, d'habiter, de consommer, de faire famille, de vieillir ensemble et, finalement, de prendre soin les un.es des autres. Mobilisant de nombreux entretiens, des références culturelles, des études sociologiques aussi bien que des textes philosophiques, Alice Raybaud montre que l'amitié porte une dimension libératrice puissante, qu'elle peut être une force de dissidence et d'émancipation. Elle appelle ainsi à réinventer ce lien, intime et politique, et à remettre nos amitiés au centre de nos vies.
p.46 Expérience quand les garçons rejoignent le club des garçons : « au début de l’expérience, les petits garçons qui viennent tout juste d’entrer à l’école, se montrent tout à fait authentique et affectueux dans leurs relations avec les enfants. Ils font même preuve d’aptitudes « remarquables en tant qu’observateurs des émotions - les leurs et celles des autres. » Mais après quelques mois passés à l’école, à peu près au milieu de leur première année de maternelle, Judy Y.Chu voit leur comportement changer. Les petits garçons tendent de plus en plus à cacher leur sensibilité et leur vulnérabilité, évitant les démonstrations d’affection en public. Par la même occasion, ils deviennent plus inattentifs aux émotions des autres. Leurs relations avec les autres garçons quoique toujours nombreuses, se montrent plus distantes; ils adoptent même une attitude « cynique », singent des comportements de domination dans leurs jeux et en classe. « Les garçons apprenent à cacher leur capcité et leur désir d’avoir des liens forts et signifiants avec les autres, car cela peut être considéré comme préjudiciable à leur masculinité » ». p.86 : « Dès lors, pourquoi ne pas s’autoriser à inventer de nouveaux schémas pour cheminer enemble dans l’existence ? En s’engageant en amité, elles se sentente dans la confiance d’un lien de soutien et de soin inconditionnels, où elles partagent des valeurs communes. » p.92 « Elle (Lucile Quillet : Le Prix à payer. Ce que le couple hétéro coûte aux femmes). montre bien que, qu’importent les bons sentiments individuels, le couple n’échappe pas à l’ordre du genre dans lequel il évolue. Un ordre qui attribue des rôles très précis à chacun et chacune, et entretient de fait une exploitation du travail gratuit des femmes, qui bénéficie avant tout aux hommes. […] en couple hétéro, les femmes s’appauvrissent, tandis que les hommes s’enrichissent. » p.102 « Pour moi, la déflégration se produit toujours quand un·e ami·e devant moi déploie sa fantaisie. p. 118. « Ces mécanismes encouragent celles-ci à prendre l’habitude de se comporter en inférieures pour plaire ou simplement espérer être aimées. […] Ne pas parler trop fort […] Ne pas rire trop fort […] Plaire aux hommes est un art compliqué, qui demande qu’on gomme tout ce qui relève du domaine de la puissance. » p.122 « Notre partenaire romantique doit être à la fois celui ou celle avec qui on habite et on dort, avec qui on gère notre argent, notre partenaire sexuel•le, notre coparent, notre soutien émotionnel, notre coach profesionnel•le parfois. […]. On peut pourtant décider de faire communauté autre, partager ces charges entre différents proches (en fonction de leurs personnalités, disponibilités et centres d’intérêt), les dissocier de l’amour romantique pour certaines… » p.140 « Se retirer des chemins traditionnels pour créer d’autres structures, bien que salvatrices pour celles et ceux qui en ressentent le besoin, « ne se fait pas sans violence, sans subir de sanction » de la part de la société. » p.143 « […] il faut un village entier pour élever un enfant et on souhaite qu’il y ait plusieurs figures autour de lui, que ce soit des conjoints ou des ami•es » p.159 « Ainsi, le partage du care qu’organisent ces modèles amicaux permet également de gommer le « réflexe de propriétaire » du côté des parents eux-mêmes, délétères à bien des égards ». p.184 « Thomas Römer rappelle que l’hébreu biblique ne faisait pas de distinction entre « amour » et « amitié » : « Pour décrire ces deux relations, il utilise la racine ‘ahab. Il n’existe aucun terme specifique pour désigner l’amitié ou l’ami. » Dans l’Antiquité grecque, l’expression de l’amour se dit d’au moins huit manières différentes. On trouve l’ « eros »ou l’amour érotique, la « philia , ou l’amour affectueux (celui qu’on associe aujourd’hui à notre définition de l’amitié, mais qu’on associe aujourd’hui à nore définition de l’amitié, mais était une forme d’amour à part entière.), « storgê » ou l’amour familial, et « pragma » qui désigne l’amour durable (celui qui a mûri, qu’on peut retrouver dans less couples mariés depuis longtemps ou dans les très longues amitiés). Mais aussi « ladus », l’amour joueur (celui des premiers émois, des flirts ou de la frivolité festive), « mania » ou l’amour obsessionnel, « philautia » ou l’amour-propre (qui peut correspondre à une saine estime de soi, nécessaire pour aimer les autres) et enfin « agape », l’amour désintéressé, celui de l’altruisme ou de l’amour spirituel. » p. 195 « l’espace urbain est avant tout occupé par les hommes ». p.207 : « dans toute interaction affective, il faut des règles, qui doivent être discutées ensemble. C’est un impensé, dans nos relations amoureuses comme dans nos relations amicales. ». p.210 : « La philosophe Hannah Arendt voyait dans l’amitié un « laboratoire de la cité », justement en raison de son articulation autour du langage partagé. « Pour les Grecs, l’essence de l’amitié consistait dans le discours. Ils soutenaient que seul un « parler ensemble » constant unissait les citoyens en une polis. Avec le dialogue se manifeste l’importance politique de l’amitié, et de son humanité propre. » » p.219 : « c’est politique la tendresse ». p.230 : Selon une citation de Gilles Deleuze : « Le système nout veut tristes et il nous faut arriver à être joyeux pour lui résister. » p.269 : « sortir de la famille nucléaire pour constituer ces acquisitions, c’est décaler les modèles de transmission traditionnels, se donner l’opportunité de les faire dériver, pour éventuellement penser d’autres organisations sociales. ». p.271 : « lorsqu’elles habitent encore ensemble, vivre entre elles ces moments de rien. Elles partagent seulement leur compagnie, l’apprécient sans rien poursuivre d’autre. »
Très bon livre sur l'amitié et des modes de vie alternatif très inspirants
On aime à se dire qu'elle est essentielle. Mais, en réalité, l'amitié est souvent raillée, considérée comme futile ou invisibilisée. Dans les films, les livres, les imaginaires et les récits que l'on fait de nos parcours, elle passe presque toujours à l'arrière-plan : la jeunesse terminée, elle devrait s'éclipser au profit du couple et de la famille. Elle est ce lien que l'on sacrifie volontiers les années passant, quitte à abandonner une petite part de soi avec. Mais pourquoi le couple romantique représenterait-il l'unique façon de cheminer avec d'autres dans l'existence ? Depuis quelques années, de plus en plus de personnes décident de revendiquer leurs amitiés et de s'engager pleinement dans ces relations. Elles y découvrent des lieux de joie, mais aussi de solidarité et de résistance face aux aliénations du système patriarcal, capitaliste et dans une période de grande incertitude écologique. Hétéros ou queers, entre femmes, entre hommes ou dans des groupes mixtes, elles et ils sont nombreux à réinventer, entre ami.es, des manières de militer, d'habiter, de consommer, de faire famille, de vieillir ensemble et, finalement, de prendre soin les un.es des autres. Mobilisant de nombreux entretiens, des références culturelles, des études sociologiques aussi bien que des textes philosophiques, Alice Raybaud montre que l'amitié porte une dimension libératrice puissante, qu'elle peut être une force de dissidence et d'émancipation. Elle appelle ainsi à réinventer ce lien, intime et politique, et à remettre nos amitiés au centre de nos vies.
J'ai été déçue. S'il y a quelques passages interessants, notamment les plus sociologiques, ca manque de profondeur et en reste au temoignage journalistique. Le livre est tres feministe, mais cela cree de la confusion.