

Très sympa comme idée et réalisation. Telerama Il y a longtemps que Christophe Chabouté a largué les amarres. Après s’être essayé à différents genres, l’Alsacien réfugié sur l’île d’Oléron a décidé d’emprunter les sentiers moins balisés de l’intime et de la contemplation du monde. Ses albums, dont le noir et blanc évoque celui du grand Comès, se concentrent sur ce je-ne-sais-quoi et ce presque-rien qui rendent toute expérience unique et pourtant universelle. Rien de fumeux dans cette démarche, ses albums sont aussi épurés et limpides que des haïkus, et tout autant essentiels. Plus loin qu’ailleurs, son nouvel opus, narre ainsi les « aventures » d’Alexandre, célibataire et gardien de nuit, qui décide un beau jour de s’offrir le grand frisson, un raid en Alaska. Mais au dernier moment, son rêve tourne court, et au lieu d’arpenter les étendues glacées en compagnie des loups et des trappeurs, Alex, un pied dans le plâtre, s’en retourne chez lui. Il prend alors, sans le savoir, une décision qui va changer sa vie : au lieu de regagner son appartement, il s’installe dans l’hôtel d’à côté. Limité dans ses mouvements, encombré par ses béquilles, l’éclopé entreprend de détailler son quartier, de prêter enfin attention au décor et aux riverains qu’il côtoie depuis des années sans les voir. Un cheminement qui s’apparente à une traversée du miroir. Un stimulant voyage immobile S’il n’y découvre pas un lapin blanc pressé, ni une reine de pique vindicative, son voyage sous la surface des choses n’est pas forcément de tout repos, ni exempt de risques. Certaines rencontres nécessitent un travail d’approche, d’autres sont épineuses avant d’être stimulantes. De ce voyage immobile ou presque, qui s’inscrit dans la lignée d’Un peu de bois et d’acier, et dans une moindre mesure de Yellow Cab, Alexandre ne sortira pas indemne. Avec ce nouvel opus, Chabouté rappelle, avant les grands départs estivaux, que le dépaysement est moins une affaire de fuseaux horaires que d’état d’esprit, et que l’exploration du minuscule procure souvent un plaisir qui ne l’est pas.